“Il y a tant d’aurores qui n’ont pas encore lui.” – Rigveda

Voici déjà le solstice d’hiver, et encore une fois nous fêtons le retour de l’exil, encore une fois nous abandonnons nos oripeaux usés et fatigués pour nous vêtir de lumière.

Nous laissons consciemment partir l’ancien et accueillons le nouveau avec notre cœur purifié, apaisé et disponible, et c’est une fête..

D’autant plus que cette année nous avons à célébrer le solstice le 21 décembre à 23h03 et la nouvelle lune en capricorne, le 22 décembre à 2h36 !

Après ces deux grands passages presque conjoints, nous pourrons aborder le pied léger, l’an 2015 qui se profile à l’horizon..

Pour saluer cet évènement j’ai choisi cette année de vous emmener à la rencontre de Dionysos, (Διονυσος), le dieu grec deux fois né dont le culte culmine avec la fêtes des “Ansthétéries”, fête solsticiale hivernale qui est aussi hommage aux morts. Ses attributs incluent tout ce qui touche à la fermentation et aux cycles de régénération. Il est le dieu des extases et des mystères qui permettent à ses adeptes de dépasser la mort, le vin, comme le soma védique, était censé aider à acquérir l’immortalité.

Dionysos personnifie alors le dieu chthonien de l’hiver en relation avec Apollon, le solaire, emblème du solstice d’été.
Dans le panthéon grec, la célébration de la fin de l’hiver est aussi une étape importante à rapprocher d’un autre culte à mystères, celui de Déméter. En effet, dans le culte orphique de Dionysos Zagros, le dieu est le fils des amours de Zeus et de Perséphone, fille bien aimée de Déméter.

Dionysos, très populaire dans toute l’antiquité, est le dieu grec de la vigne, du vin et de ses ivresses mais aussi de la végétation arborescente et de tous les sucs vitaux (sève, urine, sperme, lait, sang), comme en témoignent l’épithète de Φλοĩος / Phloĩos « esprit de l’écorce » ou encore de Συκίτης / Sykítês « protecteur des figuiers ». Mais il est aussi le dieu du théâtre et de la tragédie.

On trouve de nombreux temples qui lui sont dédiés tout autour du bassin méditerranéen.

En fonction des régions, les versions de ses aventures sont extrêmement variées, déjà en ce qui concerne l’identité de sa mère.

Diodore a rassemblé plusieurs variantes qui en font soit le fils de Déméter/Cérès soit celui d’Argé, ou même d’Io. Mais d’autres affirment qu’il aurait pour mère Perséphone ou Isis.

D’autres auteurs le déclarent fils de Léthé. Philostrate lui, lui donne pour père Indus, et une autre tradition désigne Ammon, et la mère serait alors Amalthée.

Le lieu de naissance du dieu est aussi peu certain que le nom de ses parents ! Suivant les traditions locales, il aurait vécu soir entre Thèbes et les Indes, soit en Libye, en Crète, ou à Dracanum, à Naxos, à Élis, à Éleuthère ou même à Téos.

Toutefois selon la version la plus reconnue, il serait le fruit des amours de Zeus et de la mortelle Sémélé, fille de Cadmos, roi de Thèbes, et Hermione serait sa mère. Héra, déesse et épouse de Zeus, blessée par l’infidélité de son époux, prit l’apparence de Béroé, la vieille nourrice de Sémélé pour se venger. Elle pousse alors Sémélé à exiger de voir son amant dans toute sa splendeur divine mais incapable de supporter sa vue, elle prend feu et se trouve réduite en cendre. Le dieu sauve alors son fils et s’entaillant la cuisse, y couche l’enfant jusqu’à se naissance. Ce serait l’origine de l’expression “être né de la cuisse de Jupiter”.

Comme nous l’avons déjà évoqué, dans la version orphique du mythe, Dionysos ­ Zagros y serait le fils de Perséphone et Zeus. Héra demande aux Titans de se débarrasser du nouveau­-né. Ceux­-ci le découpent en morceaux et le font cuire dans une marmite ! Athéna en recueille pourtant le cœur et le donne à Zeus qui en féconde ensuite Sémélé.

Dans les deux cas Dionysos connaît deux naissances, ce qui explique l’une de ses épithètes, δίογονος / díogonos, « le deux fois né ». Pour le soustraire à la vengeance d’Héra, il est confié alors à sa tante Ino (sœur de Sémélé) et à son époux, Athamas. Mais Héra le découvre et de rage rend le couple fou. Dionysos part alors vivre avec les Nymphes sous la direction de Silène, le vieux satyre, sur le mont Nysa (ou Nyséion) en Thrace. Toujours pour échapper à Héra, il aurait également été transformé en chevreau. D’autres versions le disent protégé par Hermès avec qui il entretenait une liaison.

Couronné de pampres, le thyrse, la patère ou le canthare à la main ou encore la grappe de raisin ou la ciste mystique, on voit souvent Dionysos chevauchant un bouc, un âne ou une panthère apprivoisée et accompagné de satyres, de ménades, ou du vieux Silène, père adoptif et précepteur du dieu. Tous ensemble, ils forment le fameux « cortège dionysiaque ». Dionysos a joué un rôle important dans la culture grecque antique car il était le patron de deux grands festivals d’art dramatique, les “Lénéennes” et les “Dionysies urbaines”.

Bien qu’il soit le dieu du vin, il semble que ce ne soit pas lui qui l’ait inventé car Homère fait dire à Ulysse que Dionysos est redevable à Maron, fils d’Evanthe et prêtre d’Apollon de la ville d’Ismaros qui lui aurait fourni une outre remplie de vin qui lui servira à enivrer Polyphème. Selon les versions qui là aussi sont nombreuses, il fait partie ou non des douze Olympiens alors qu’il ne vécut pas sur le mont Olympe. Il est généralement décrit comme un dieu errant. Dénommé Bacchus par les romains, il fut longtemps assimilé à une ancienne divinité italique, Liber Pater.

On a longtemps pensé que son culte était récent pourtant la découverte de tablettes mycéniennes à Pylos remettent cette idée en question.

Il est surtout connu pour être le père de la comédie et de la tragédie dont une des étymologies viendrait du grec τράγος / trágos, « bouc ». Au départ, il était surtout question de sortes d’illustrations du culte qui se jouaient dans les théâtres grecs, en présence des prêtres, au cours des “Dionysies”, un peu comme les “Mystères” que l’on pouvait voir au Moyen Âge sur les parvis des cathédrales occidentales. Ces saynètes avaient une forme littéraire scandée particulière, le dithyrambe, accompagné de chants et de musiques dissonantes et syncopées, rythmés par des percussions et des flûtes. Leur but était de provoquer la surprise et l’inquiétude, pouvant parfois aller jusqu’à être effrayant à l’exact opposé d’Apollon, emblème de l’harmonie et de l’art lyrique. Les flûtistes appelés aulètes n’étaient pas reconnus et respectés comme des artistes ou des musiciens mais comme des bateleurs. L’usage de leur instrument leur déformait la bouche et cela heurtait l’esthétique grecque très exigeante, donnant lieu à des moqueries et des quolibets à leurs égards.

Il existait deux cultes dionysiaques, un public qui se déroulait durant les « Dionysies », et un autre secret qui avait lieu entre initiés et donnait lieu à des Mystères et des cérémonies initiatiques.

Ce groupe d’initiés portant le nom de thiase pratiquait un culte secret nocturne dans des cavernes au cours desquels on initiait les nouveaux membres du thiase, et qui officiaient dans la dimension ésotérique de la résurrection du dieu « deux fois né ». On manque de sources pour savoir ce qui s’y passait exactement, mais ces cérémonies ont semble­-t-­il perduré jusque sous l’Empire romain. Elles comportaient des sacrifices, mais aussi des délires dus à l’ivresse ou à la consommation de drogues végétales, et des excès de toutes sortes, notamment sexuels.

Dionysos mènera une existence mouvementée et voyageuse. Il aura également des amours plurielles, aussi bien avec des représentants de la gent masculine que féminine. Son grand amour sera malgré tout Ariane qui deviendra sa femme et sera divinisée. Elle deviendra un symbole de la végétation et de la fertilité. Il aura aussi plusieurs fils avec Aphrodite, la déesse alchimique, Priape, Hyménée et Hermès.